C'est cette conception large qu'en définitive
nous nous proposons de mettre en oeuvre, malgré ce que son éclectisme
peut offrir de peu satisfaisant intellectuellement. Mais nous avons constaté
la contiguïté de la sociologie juridique à plusieurs
autres disciplines, et l'expérience nous enseigne qu'une science
nouvelle (surtout quand elle se crée par scission d'une science
antérieure) a toujours bien de la peine à fixer exactement
ses frontières, courant ainsi Ie péril d'y consumer beaucoup
de temps, de colloques et de travaux. C'est pourquoi, après avoir
déterminé approximativement ce qui peut constituer le noyau
de la sociologie juridique, lui appartenant de prima facie, nous n'empêcherons
pas celle-ci de rayonner à partir de là fût-ce au risque
d'empiéter sur les domaines voisins, tels que sociologie criminelle
ou ethnologie , sociologie politique ou psychologie, et bien entendu sociologie
générale prenant son bien où elle le trouvera.
Il est vrai que, sous un autre point de vue. c'est une
conception restrictive que nous suivrons : cette sociologie juridique ne
sera pas une sociologie de tout le droit, de tous les droits. Le champ
eût été immense. Par nécessité. il fallait
choisir un axe principal : il sera donné par le droit privé,
plus spécialement le droit civil. La raison la plus objective que
l'on en puisse avancer est qu'entre tous les secteurs du droit (surtout
en comparaison au droit public et au droit pénal), le droit civil
est celui dont la sociologie, formée le plus tardivement, appelle
encore le plus de recherches. Il faut, autrement dit, prendre le taureau
par les cornes.